Christian Vanhenten
31 octobre 2010

Le temps libéré

Lorsque l’on court tous les jours après le temps, les rendez-vous, les contraintes. Lorsque même les loisirs prennent la forme d’un rendez-vous et lorsqu’enfin on peut se laisser … à respirer, on en vient à espérer de libérer un peu de temps pour prendre le temps plutôt que ce soit lui qui nous prenne.
Vient alors cette plage de temps libre qui nous fait prendre conscience que nous sommes comme groggy, saoulé d’activité. La désintox est un processus pénible. Le temps libéré devient comme une angoisse nouvelle, comme une peur du vide. Le mental se tourne à gauche, à droite, cherchant à être repris en main par une urgence quelconque, une sonnerie rappelant la prochaine échéance, le tut-tut-tut-tuut-tuut-tut-tut-tut d’un sms salvateur. Et si rien ne vient il nous reste le courriel et si celui-là reste lettre morte il reste les réseaux sociaux où là il se passe toujours quelque chose. Ouf!
Quelques videos youtubes plus loin, quelques citations automatiques plus loin, quelques “j’aime” plus loin le problème reste le même … avec quelques heures de moins.
Identifier les bouffeurs de temps, partir à la recherche du temps vide. Se lacher tel le parachutiste plongeant dans le vide en chute libre. Sentir le remue-ménage intérieur, l’accueillir avec tendresse et curiosité comme lorsque, dans une artère commerciale bondée de monde, on reconnait à distance une personne connue dans la foule, un visage familier masqué par les inconnus en mouvement. S’arrêter, respirer et attendre la rencontre.
Soudain l’espace temps devient plus ample, plus vaste. Retour à une forme de l’essentiel, ce qui reste lorsque le superficiel s’efface.
Dans ce nouveau paysage les choses essentielles se distinguent: une personne chère, une relation précieuse, une pensée oubliée, un projet qui n’attend plus que nous.
Continuer de ne rien faire, que la vase retombe et que l’eau redevienne claire pour voir à nouveau que l’étang (l’étant) est plein de vie.